La rentrée scolaire 2017-2018 au Cameroun ne se passe pas comme prévu.
Si les élèves ont repris le chemin de l’école dans la partie francophone, ceux de la partie anglophones étaient abonnés aux absents. En effet, hier lundi 4 septembre 2017, les classes sont restées désespérément vides dans les villes de la partie anglophone du Cameroun. Pas d’élèves donc pas de cours malgré la bonne volonté des enseignants et la forte présence des forces de l’ordre.
Visiblement, le geste d’apaisement sur la crise anglophone effectué par le régime de Paul Biya le jeudi 31 août dernier, n’a pas suffi à rassurer les citoyens anglophones. Ceux-ci estiment que l’essentiel n’a pas été fait, en l’occurrence la libération des contestataires de première importance. Ils renvoient donc l’Etat camerounais à sa copie s’il veut réellement le retour à l’ordre.
Un geste louable de la part du gouvernement de Yaoundé
Le jeudi 31 août le gouvernement camerounais avait fait un geste fort en procédant à la libération d’une trentaine de détenus anglophones. Ils avaient été arrêtés suite aux émeutes de janvier 2017. L’Etat espérait alors que les mouvements insurrectionnels cesseraient pour de bon après trois mois de bras de fer. Pourtant, même décapitée, la contestation s’était durcie. En procédant à la libération des leaders anglophones jeudi passé, le gouvernement croyait bien faire. Cependant son calcul par rapport à la rentrée scolaire ne fonctionnera pas. Les Anglophones n’entendent pas manger de ce pain-là, un pain bien trop béni.
Et pourtant les cours n’ont pas repris
Comme constaté sur place hier, les cours n’ont pas repris dans la partie anglophone. Les villes de Bamenda et de Buea ont observé un vaste mouvement de paralysie comme toutes les autres villes du Sud-ouest et du Nord-ouest du pays. En effet, ce lundi avait été tacitement déclaré ville morte c’est donc raisonnablement qu’aucun élève anglophone n’a effectué le déplacement pour l’école. Seuls quelques Francophones se sont présentés devant leurs enseignants. Mais leur nombre était insuffisant pour une reprise effective des cours. Même si les Anglophones ne représentent que 20% de la population camerounaise, ils sont majoritaires dans leurs régions d’origines. A l’école catholique Saint-Joseph de Bamenda par exemple les enseignants, en tenues solennelles, n’ont pas pu professer. Dans les salles de classe, ils n’ont trouvé que l’écho de leurs voix pour leur répondre. A Buea également c’est le même son de cloche, des salles de classe désertes, des élèves qui viennent au compte-goutte. La reprise n’est décidément pas pour ce jour malgré les paroles de quelques acteurs de l’éducation régionale. « La rentrée se passe très bien, les enseignants sont là et les élèves aussi » avait déclaré George Nditafon proviseur du lycée bilingue Down-Town de Bamenda. Inutile de préciser que c’est un discours optimiste pour ne pas dire propagandiste ou mensonger.
En cause, l’insatisfaction après la vague de libération
Les Anglophones n’ont pas repris le chemin des classes parce qu’ils ne se satisfont pas des libérations de la semaine dernière, même en masse. Les habitants des régions anglophones affirment que l’Etat avait fait ses petits calculs pour voir l’école reprendre après une année blanche. Ils n’entendent pas mordre à l’hameçon surtout quand les acquittements n’ont pas concerné certains leaders comme le dénommé Mancho Bibxy, alias « BBC ». La libération de ces derniers détenus serait primordiale pour amorcer une quelconque détente. En outre les Anglophones veulent revenir au statut fédéraliste d’après les indépendances à défaut d’une indépendance.
En tout cas les élèves dans les régions anglophones du sud-ouest et du nord-ouest devraient attendre encore avant de reprendre le chemin de l’école. Les revendications politiques ont pris le dessus sur l’éducation des enfants. C’est le seul moyen pour les contestataires de faire plier le gouvernement de Yaoundé. Une autre année blanche serait catastrophique et l’UNESCO pourrait déclencher l’alarme. Dans ce cas la contestation pourrait se durcir, passant du boycott de l’école au conflit armé.