Kenya : nouvelles élections sur fond de revendications

Tatiana Agostino

L’élection présidentielle kenyane s’est déroulée le mardi 8 août dernier et avait vu la victoire d’Uhuru Kenyatta sur son plus grand rivale Raila Odinga.

Ce dernier avait protesté avec véhémence contre les résultats donnés par la commission électorale indépendante. Il avait d’abord menacé de pousser ses militants dans la rue avant de se raviser. Finalement la Cour Suprême kenyane lui donne raison quand elle décide, le 1er septembre, de l’annulation du scrutin présidentielle pour irrégularités. Voilà une dernière opportunité offerte à Raila Odinga de se faire enfin élire après ses échecs de 1997, 2007 et 2013.

Le leader de l’opposition Raila Odinga ne se réjoui pas simplement d’affronter le président sortant Uhuru Kenyatta. Pour ne pas revivre l’expérience du 8 août il pose certaines conditions. L’Etat devrait y consentir afin que l’élection présidentielle du 17 octobre soit possible.

Une élection finalement pas si transparente que ça

Après l’élection du 8 août, les observateurs nationaux et internationaux s’étaient dits satisfaits du déroulement du scrutin. L’on avait parlé d’une élection transparente et juste. Même John Kerry, l’ancien secrétaire d’Etat américain avait affirmé que le vote avait été parfait, du moins dans l’ensemble. La commission électorale avait à son tour entériné l’élection présidentielle au grand dam de Raila Odinga et de ses partisans qui crient à la fraude. L’opposant décide de descendre dans la rue, ce qui a fait planer pour un temps e spectre du vote de 2007. Heureusement, quelques jours après, le leader de l’opposition fait volte-face au grand soulagement des populations et de la communauté internationale. L’on croyait alors que le dossier était classé. Après tout, en Afrique, n’est ce pas qu’un opposant n’a jamais reconnu sa défaite même quand elle était claire ?

LA Cour Suprême fait mentir tout le monde

Tout le monde croyait le contentieux électoral kenyan vidé à jamais, quand le 1er septembre dernier, la Cour Suprême fait une sortie spectaculaire. En effet, après deux semaines d’auditions et de délibérations sous haute tension, les juges constituant cette Cour avaient décelé des « inégalités et des irrégularités » qui ont « affecté l’intégrité de l‘élection ». C’est à la suite de cette déclaration que la Cour Suprême déclare que l’élection du 8 août est « invalide et nul ». C’est un coup de massue pour le pouvoir en place et une leçon pour toutes les institutions suprêmes africaines trop inféodées à la politique. En même temps la Cour Suprême fait mentir tous les observateurs et surtout la Commission Electorale qui avait déclaré le scrutin présidentiel impeccable. Elle a décidé par la même occasion de l’organisation d’une nouvelle élection le 17 octobre prochain.

Raila Odinga impose les nouvelles règles du jeu

Cette décision vient donner raison au vieil opposant Raila Odinga, lui qui ne cessait de crier à la fraude. Ragaillardi par cette décision de la plus haute juridiction de l’Etat, il décide de passer à l’offensive. Pour cela il pose ses préalables avant de monter à nouveau sur le ring présidentiel. Ainsi exige-t-il un audit du système électronique de l’IEBC, la démission de plusieurs de ses membres et la possibilité pour toute personne éligible de se présenter à la nouvelle élection. En effet, la Commission avait décidé lundi dernier que seuls Uhuru Kenyatta (54,27%) et Raila Odinga (44,74%) pourraient à nouveau s’affronter. Elle écartait du coup les six autres candidats qui avaient cumulé moins de 1% des bulletins de vote.
La décision de la Cour Suprême est une décision historique et même la première du genre en Afrique. Elle démontre la maturité et l’intégrité des juges commis à cette tâche. En même temps cette annulation donne un motif d’espoir à l’opposant Raila Odinga. Cependant l’on peut craindre maintenant une mauvaise réaction des partisans du régime si leur mentor venait à perdre.

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