Le ministre congolais de l’économie vient de réagir à la lutte anti Franc Cfa engagée depuis quelques mois par l’activiste Kemi Seba. En dépit de l’idée de création d’une monnaie commune à la CEDEAO, les débats autour de la devise coloniale s’enflent de jour en jour. Soucieux d’apporter quelques éclaircissements sur ce débat, le ministre et enseignant chercheur à l’université Marien Ngouabi de la capitale Brazzaville a passé en revue un certain nombre de revendications portées par les partisans de la révolution monétaire en Afrique de l’ouest et en Afrique centrale. Si pour l’activiste béninois l’indépendance monétaire est liée à la souveraineté d’un pays, pour le ministre congolais de l’économie il y’a une grande différence entre avoir sa propre monnaie et être indépendant. Dans une contribution publiée par Jeune Afrique, Gilbert Ondongo appelle avant tout les uns et les autres ‘‘à se demander quel est le vrai sujet qui mérite débat’’ concernant l’avenir du Franc Cfa. L’enseignant universitaire et ministre d’état s’oppose à l’idée de création d’une monnaie unique par chaque pays de la zone monétaire, comme le clament haut et fort les partisans de la révolution anti-Cfa.
Indépendance d’un pays vs souveraineté monétaire
Pour Gilbert Ondongo, il convient avant toute chose d’établir une différence nette entre la souveraineté d’un pays et le fait de disposer sa propre monnaie : « La souveraineté d’un pays ne se juge pas à sa monnaie. Une nation, une communauté de personnes sur un territoire, peut disposer d’une monnaie qui lui est propre, sans être souveraine pour autant. A contrario, une nation peut partager une monnaie avec d’autres, sans en avoir le contrôle, et en même temps, disposer des capacités à décider et à agir seule dans plusieurs domaines qui lui confèrent une certaine souveraineté. La République démocratique du Congo, qui a sa monnaie, n’est pas plus souveraine que la France qui a une monnaie commune. L’inverse est tout aussi vrai. Les États-Unis d’Amérique, avec leur dollar, ne sont pas moins souverains que la République fédérale d’Allemagne, qui a l’euro en partage avec dix-huit autres pays. », a souligné le ministre congolais dans une contribution parue sur Jeune Afrique mardi. Même s’il semble clairement se présenter comme l’un des défenseurs du franc Cfa, Gilbert Ondongo ne nie pas quelques difficultés que rencontre la monnaie coloniale.
Le problème de la fixité du franc Cfa à l’euro
« Il y a de bonnes raisons de se plaindre de la fixité du franc CFA par rapport à l’euro. D’où la nécessité de préconiser des marges encadrées de flexibilité, permettant des ajustements ad hoc du franc CFA. Cela pourrait être un ajustement à la baisse de 5 à 15 %, pour rendre plus compétitifs les produits des pays de la zone franc vendus en Europe, ou encore à la hausse dans les mêmes proportions, en vue d’alléger le coût des importations en provenance d’Europe. », explique le ministre congolais de l’économie dans sa contribution parue sur Jeune Afrique le 9 janvier. Le taux de parité fixe entre l’Euro et le franc Cfa est l’un des principaux points d’ancrage de la lutte menée par les partisans de la révolution monétaire en Afrique. Pour mettre fin à ce système d’arrimage de la monnaie coloniale l’euro, Kemi Seba et ses soutiens préconisent la suppression de la monnaie pour permettre à chaque pays de disposer de sa propre devise, une alternative à laquelle semble se dissocier le ministre congolais de l’économie. Selon Gilbert Ondongo, les pays africains doivent ‘‘s’atteler à bâtir de vraies économies compétitives, à les fortifier en les diversifiant chaque jour un peu plus, plutôt que de se préoccuper de disposer chacun, d’une monnaie’’.