Plus d’un mois après son retour en Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo a finalement décidé de rencontrer le président Alassane Ouattara. La rencontre entre les deux hommes est prévue le mardi 27 juillet prochain.
Les Ivoiriens espèrent qu’elle lancera véritablement la réconciliation nationale tant recherchée depuis plusieurs années. Mais rien n’est sûr connaissant les calculs politiques qui ont toujours sous-tendu ce genre de rencontre. L’on ne sait d’ailleurs pas l’objet de la visite de l’ex prisonnier de la Haye à son successeur à la tête du pays.
Le 17 juin 2021 n’a pas porté ses fruits
Laurent Gbagbo est rentré en Côte d’Ivoire le 17 juin 2021, dans une liesse populaire. Ses partisans avaient envahi les rues d’Abidjan pour fêter son retour, triomphalement. Un accueil auquel ont peu goûté les militants du RHDP, parti au pouvoir. Qu’à cela ne tienne ! La plupart des Ivoiriens espéraient que l’arrivée au pays de l’ex prisonnier de Scheveningen enclencherait véritablement le processus de réconciliation nationale. Mais, il y avait eu un premier couac, dès l’aéroport Félix Houphouët Boigny. Attendu au pied de l’avion pour souhaiter « Akwaba » (« Bienvenu » en langue Baoulé) à son « frère » Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara avait préféré faire un long voyage en Afrique. Il avait notamment assisté au sommet de la CEDEAO sur le Mali à Accra (Ghana). Aussi, aucun officiel ivoirien, pas même le très symbolique ministre de la réconciliation, Kouadio Konan Bertin dit KKB, n’avait effectué le déplacement à l’aéroport. Pour sa part, Laurent Gbagbo a refusé le pavillon présidentiel que le chef de l’Etat ivoirien lui avait réservé.
Un premier appel depuis dix ans
De mauvais signaux renforcés par le calendrier suivant de Laurent Gbagbo. En effet, après un séjour dans son village natal et un voyage en République démocratique du Congo (RDC), le président du FPI a préféré rencontrer le président du PDCI-RDA Henri Konan Bédié, le samedi 10 juillet à Daoukro. Une visite qui a suscité de vives réactions parmi les dignitaires du régime ivoirien. Près de deux semaines après cet évènement, on apprend que Laurent Gbagbo a finalement accepté de rencontre Alassane Ouattara. Le rendez-vous a été fixé au mardi 27 juillet prochain, au Palais présidentiel que le célèbre pensionnaire de la Haye retrouve dix ans après sa chute.
Selon des informations fournies par Africa Intelligence, c’est le leader du FPI qui a fait le premier pas vers son aîné. Il a appelé le chef de l’Etat ivoirien, un jour qu’il était sûr de l’avoir en ligne. Ils ne s’étaient pas adressé la parole depuis avril 2011. Durant leur échange, les deux hommes ont évoqué le processus de réconciliation national clairement en panne. Le locataire actuel du palais présidentiel a sans doute pris soin de taire son mécontentement sur les propos tenus par son interlocuteur dans un reportage de la chaîne Arte et une interview accordée à France 24 fin juin. Laurent Gbagbo a insinué avoir gagné la présidentielle de 2010, qui a débouché sur un conflit armé. Cette crise post-électorale a fait officiellement 3000 morts.
Oublier son égo et sa fierté
Le rapprochement entre les deux rivaux aurait été facilité par la première dame de Côte d’Ivoire, via la « petite femme » (c’est comme ça qu’il l’appelle) de Laurent Gbagbo. Nady Bamba et Dominique Ouattara aurait eu un entretien téléphonique qui a ensuite facilité la démarche de l’ancien président ivoirien. De toutes les façons, il a fallu que l’un des protagonistes avale son égo et sa fierté pour joindre l’autre. Et c’est Gbagbo qui l’a fait, d’après les informations reçues. Certains internautes ont considéré ce geste comme l’expression de la sagesse africaine. Celle-ci veut que le cadet aille toujours vers l’aîné en pareille circonstance. Aussi, la politesse politique voudrait que l’ancien président fasse le premier pas vers l’actuel, détenteur du pouvoir étatique.
Une victoire pour la Côte d’Ivoire
D’autres, par contre, ont interprété la démarche de Laurent Gbagbo comme une « victoire » d’Alassane Ouattara qui a su tenir fermement sur sa position pour faire plier son rival. Quoiqu’il en soit, l’Ivoirien épris de paix attendait ce rapprochement. Celui-ci pourrait lancer véritablement la réconciliation nationale, gage de stabilité politique et de développement économique. On aurait aussi aimé que le « doyen » Henri Konan Bédié soit associé à cette rencontre ou à une autre plus symbolique. On imagine ainsi les trois hommes, main dans la main, lançant un appel fort au peuple ivoirien pour tourner définitivement la page sombre de son histoire.