Le Gabon a produit de grands rappeurs tels que, V2A4, Koba Building, Si’Ya Po’Ossi X, Keurtyce ou encore Movaizhaleine. Ce dernier groupe retiendra notre attention dans ce billet.
Movaizhaleine est l’un des groupes aux origines du rap gabonais. Né dans le contexte des revendications du début des années 1990, Movaizhaleine excellera dans le rap politique. Aujourd’hui, les membres de cette bande font figure de précurseurs du rap national voir le rap international. Prenez maintenant connaissance avec Movaizhaleine, la pointe acérée de la musique gabonaise.
Formation et origine
Tout est parti du Lycée National Léon Mba de Libreville, du nom du premier président de la République du Gabon. En 1992, comme un de leurs professeurs avait manqué son cours, cinq élèves décident de s’occuper, d’une manière plutôt atypique. Ils se réunissent et crée un groupe de rap. Rappelons qu’à l’époque ce genre de musique faisait une apparition fulgurante notamment en France avec MC Solaar ou NTM. Threat P (le futur Lord Ekomy Ndong), Tough G, Sky Powers, Evil Fancy et H2S appellant d’abord le groupe Bad Breath. Il était de mode de tout faire à la manière des Américains, d’où les noms en Anglais. En 1993, ils préféreront la traduction anglaise «Mauvaise haleine » donc Movaizhaleine, ayant eu marre de voir leur nom écorché par le public. De 1992 à 1993, le groupe fera de petites scènes ici et là, à l’occasion des fêtes scolaires. Leur premier titre Racisme évoqua la ségrégation qui avait cours, entre les Européens vivant au Gabon et les Gabonais. Ce morceau diffusé sur les plus grandes radios au Gabon attirera la sympathie des jeunes Gabonais qui vivaient au quotidien ce problème. Grâce au grand frère de Lord Ekomy Ndong les cinq rappeurs ont la chance de participer à un spectacle d’interprétation qui les révèle un peu plus. Après cet épisode, la bande décide de s’investir à plein temps dans leur passion. Manquant de moyens et de soutiens, certains s’essayent au beatmaking en racolant des instrumentaux US et Frenchies. Ce sera essentiellement la tâche de Lord Ekomy Ndong et Tough G qui apprennent à maitriser l’échantillonnage des instrumentaux déjà connus. Il s’agit notamment des beats de rappeurs comme Public Enemy, NWA ou encore Naughty By Nature. Quant à Threat P, il se charge de trouver une petite boite à musique pour rendre le travail de Lord Ekomy et Tough G un peu plus aisé. Fort de tout ce travail en underground et du rêve qui les anime, ils commencent à se prendre au sérieux. Ils passent à l’étape suivante : la publicité de proximité et l’enregistrement de tubes.
Débuts et succès
Sous le nom de Movaizhaleine, les cinq éléments participent à de nombreux concours et à des sound systems organisés dans les quartiers par des sponsors. Movaizhaleine a plus de visibilité et bientôt atterrit dans les studios d’Africa Numero 1. Les 5 rappeurs participent à des émissions telles que Black Feeling aux côtés et côtoie le milieu rasta. Cette expérience aura une influence sur leur futur rap qui empruntera un peu au reggae. Movaizhaleine devient entre temps, un trio au gré des ambitions de chacun. En 1993, le Centre Culturel Français organise un concours de rap au parc d’exposition de Libreville. Le groupe, désormais composé de M16 (Lord Ekomy Ndong), Kriminel (Maât Seigneur Lion) et Tough G finit 2e au concours. De ce fait, il bénéficie d’une production musicale de la part du CCF qui finançait déjà la carrière d’un des plus grands groupes de rap gabonais : le CIA Posse X. A l’occasion de l’implantation de RFI à Libreville, le groupe passe à un autre statut. Grace au CCF, Movaizhaleine a une lucarne pour se frotter au plus grand rappeur du pays et pour se faire voir du monde. En 1994, le trio deviendra peu à peu un duo composé de Maât devenu Mat et Lord Ekomy Ndong. Tough G qui avait connu des difficultés de scolarité se détache petit à petit des autres. Dans le même temps, il s’oriente vers le chant, mais cela ne lui réussit pas trop. La même année, Mat et Lord Ekomy Ndong produisent le premier véritable album du groupe, intitulé La loi du Talion.
Les années 2010 à 2017
Le duo s’investit à cent pour cent dans la musique rap et s’installe dans le peloton de tête des grands groupes de rap gabonais. Leur travail sera récompensé en 2008 par une nomination dans la catégorie du meilleur vidéo-clip pour le titre Nous aux MTV Africa Music Awards. Le groupe fait à présent un rap plus engagé, plus politique, refusant de côtoyer le rap bourgeois du Gabon. En 2011, ils ont la chance de faire partie du collectif d’artistes qui sort le titre Hands Across the World. Il y avait entre autres le grand R. Kelly et Fally Ipupa le congolais. La même année Movaizhaleine signe un contrat avec Rockstar 4000, un label de Sony Music Africa. Cela leur permettra de prester dans plusieurs salles parisiennes. En 2016 le duo sortira le titre Pas comme on l’entend et est primé aux Awards de l’Info dans la catégorie « Prix de l’artiste gabonais ».