Alpha Blondy

En plus d’être une légende vivante dans son pays la Côte d’Ivoire, Alpha Blondy est également une sommité de la musique reggae mondiale. Ces morceaux comme le titre Brigadier Sabari, Sweet Fanta Diallo, Jérusalem, Bory Samory sont autant de succès et de de classiques. Depuis les prouesses planétaires d’Alpha Blondy la Côte d’Ivoire est devenue la troisième patrie du reggae après la Jamaïque et le Royaume Uni, les terres d’origine de la légende du genre, Bob Marley. C’est avec raison qu’on dit qu’il fait partie des personnalités ivoiriennes, avec Didier Drogba et Houphouët Boigny, dont les noms seuls suffisent à se rappeler de la Côte d’Ivoire sur la carte du monde. Malgré les années qui sont passées, les albums du chanteur tels que Jah Glory, Cocody Rock, Masada ou Elohim sont toujours écoutés dans les quartiers d’Abidjan et de la Côte d’Ivoire.
Cette légende vivante de la musique ivoirienne n’a pas connu une enfance à l’abri de tout besoin. Bien au contraire elle fut difficile autant que sa jeunesse. Parcourant son pays, le Libéria et les Etats Unis comme un globe-trotter, l’artiste était sans cesse à la recherche de son destin. Une sorte de voix intérieure semble l’aiguillonner et le conduire vers les destinations qui participeront à la construction de la légende future. Alpha n’a non plus pas été un talent qui a vite éclos. Alors que tout espoir semblait perdu pour lui, il percevra, de retour des Etats Unis, la lueur qui le mènera au sommet. Comme toujours les plus grands hommes viennent de loin et Alpha Blondy n’en fait pas exception. Cet article passera en revue son enfance, les moments clés de sa carrière et de sa vie. Voici l’histoire de la légende vivante du reggae mondial.

Sommaire :

Une enfance modeste et une vie instable

De son vrai nom Seydou Koné, Alpha Blondy est né le 1er janvier 1953 à Dimbokro. Cette ville située au centre-est de la Côte d’Ivoire est aussi le lieu de naissance de l’actuel président de la Côte d’Ivoire, son Excellence Alassane Dramane Ouattara. Il est issu d’une famille de neuf enfants originaire du nord du pays. Le petit Seydou Koné passe les premières années de sa vie aux côtés de sa grand-mère dont il est le « petit mari ». Cette expression est utilisée en Afrique par les grand-mères ou les tantes à propos des petits enfants ou des neveux. Elevé parmi les femmes âgées il apprendra de nombreuses expressions de la langue dioula (une ethnie populaire de Côte d’Ivoire dans laquelle on regroupe les nordistes et les commerçants). En plus de la langue, il apprendra les valeurs qui doivent toujours présider aux grandes destinées à savoir le franc-parler et la vérité. En 1962, il retrouve sa mère à Korhogo au nord du pays. Celle-ci l’emmène à Odienné où son mari travaille pour la Compagnie Française de Côte d’Ivoire, la CFCI. Il passe dix ans dans cette ville du nord, où en 1972, il préside la section locale du Mouvement des Elèves et Etudiants de Côte d’Ivoire (MEECI).

L’adolescence ou la quête de soi

A Odienné, Seydou Koné fait des études dans le Lycée Municipal de la ville. C’est dans ce cadre qu’il deviendra le secrétaire général local du Mouvement des Elèves et Etudiants de Côte d’Ivoire, un syndicat qui sera avalé plus tard par la toute-puissance Fédération Estudiantine de Côte d’Ivoire (FESCI) que dirigeront des personnalités politiques actuelles comme Soro Guillaume et Blé Goudé. A l’époque Seydou Koné se fait appeler Elvis Blondy, son pseudonyme syndical. La même année, il part poursuivre ses études en classe de seconde au Lycée Normal de Korhogo. Là-bas il rentre à l’internat et fera la connaissance de copains avec qui il formera une bande. Avec Price (guitare), Pop Touré (batterie) et Diallo Salia (basse), ils forment l’Atomic Vibrations. Les Atomic Vibrations jouent en matinée les weekends, pour les beaux yeux des jeunes filles du couvent voisin de Sainte Elisabeth. Mais Alpha Blondy ne jouera pas que pour faire le fanfaron et avoir les faveurs d’une belle de l’autre côté du mur. Il vise plus haut et a déjà un plan bien tracé de ses ambitions. Désireux d’apprendre l’anglais, il conviant sa mère de le laisser partir en auto-stop pour le Libéria. Une décision qui le fait ressembler au petit personnage du roman Allah n’est pas obligé de son compatriote Amadou Kourouma. En 1973 donc il part pour Monrovia, la capitale libérienne avec l’accord de sa mère. Il y passe un peu plus d’un an et y apprendra la langue de Shakespeare tout en offrant des cours de français pour s’en sortir financièrement. La tête plein les rêves, il décide de rentrer au pays avec l’idée d’immigrer aux Etats Unis dans le but de perfectionner son anglais. Il est aussi motivé par le besoin d’y développer sa musique car à l’époque il avait produit un morceau au Libéria, Come-Back Jesus qui sera réédité plus tard. Le rêve américain est à portée de main quand il débarque à New York en 1976.

L’aventure américaine et la découverte du mouvement rasta

Dès son arrivée, il s’inscrit dans une première école, la Geneva School Business où il suit des cours d’anglais commercial pendant trois mois. Ensuite il entre au Hunter College pour prendre des cours de langue accélérés, puis passe un test qui lui permettra de s’inscrire à L’American Language Program de l’Université Columbia, l’une des plus prestigieuses universités aux Etats Unis. Pendant deux ans, il suivra des cours destinés aux étudiants étrangers. En même temps il enchaine de petits boulots pour subvenir à ses besoins. Il est notamment livreur et coursier, mais cet effort pèse énormément sur sa santé. Il rejoint la ville de Waco au Texas à la demande d’un ami et frère Ivoirien, Oulai Joachim qui l’avait conseillé de se reposer un peu. A Waco, son compatriote l’aide à trouver un job dans l’usine de dindons Plantation Food, puis dans celle de poulets. Alpha ne se sent pas à sa place dans ces abattoirs. Il préférait encore fréquenter les milieux caribéens et jamaïcains qui rassemblaient la plus part des immigrés afro. A New York, il fréquentait ce milieu où il fit connaissance avec l’univers Rasta, une découverte primordiale pour sa carrière. Après la volaille donc Alpha Blondy trouve un emploi chez un distributeur de musiques chrétiennes du monde. Tout en travaillant au sein de cette structure, Alpha Blondy continue d’écrire ses textes. Par la suite Il revient à New York et fait une rencontre heureuse à Brooklyn. En effet, il y fait la connaissance de Clive Hunt, un producteur et réalisateur de musique. Sous sa houlette, Alpha Blondy enregistre huit titres qui ne verront jamais le jour faute de moyens financiers de la part du réalisateur. Mais Clive Hunt conseille quand même à l’artiste ivoirien de quitter New York Pour Londres. Alpha Blondy préfère n’est nullement enchanter par Londres. L’homme préfère rentrer au pays natal avec le sentiment d’avoir échoué aux Etats Unis. Il lui semblait que ces quatre années passées au pays de tous les possibles, n’ont pas contribué à matérialiser son rêve de toujours : devenir un artiste célèbre.

Retour gagnant au pays

De retour à Abidjan, sans gloire, il habite chez des amis à Adjamé, une commune commerciale d’Abidjan. Pour retrouver s’occuper, il se met à répéter avec des musiciens Ghanéens au Bracodi Bar à Adjamé. Désormais il se fait appeler Alpha qu’il a ajouté au Blondy pour signifier un nouveau départ et l’espoir qui va avec. En 1981, Alpha Blondy retrouve un vieil ami d’enfance en la personne de Roger Fulgence Kassy, le célèbre animateur ivoirien de l’émission à succès Podium. Les deux amis ont eu le BEPC la même année et avaient l’habitude de se fréquenter quand ils se retrouvaient à Abidjan à la faveur des congés et des vacances. Ils vivaient chez leurs oncles respectifs qui travaillaient tous les deux à la présidence de la République. Roger Fulgence Kassy lui propose de passer à l’émission qu’il présente à la RTI, Première chance. Le chanteur aura bientôt trente ans et Première Chance apparait pour lui comme la dernière chance. Sur les antennes de la RTI Alpha Blondy interprète trois de ses chansons que sont Bintou Were Were, Dounougnan et The End. Roger Fulgence qui avait cru en son talent, lui avait prédit une célébrité imminente. Ce sera effectivement le cas car Alpha Blondy suscite la ferveur du public après sa prestation. Devant cet engouement Georges Benson, producteur de l’émission Première Chance, décide de produire l’artiste. En 1983, sort Jah Glory du côté du label africain Syllart Records du producteur Ibrahima Sylla. C’est dans cette immense joie que sa grand-mère chérie décède, hélas. Dans cet album se trouvait le morceau « Brigadier Sabari » que Georges Benson avait hésité à mettre en avant du fait de la dénonciation des violences policières. Il risquait de s’attirer des ennuis avec les autorités policières et politiques. Mais il le propulse quand même, un peu à contre cœur. Or c’est ce titre qui donnera le plus de succès à Jah Glory. Alpha Blondy franchit les frontières de l’Afrique avec cet album. Partout dans la sous-région il est écouté, apprécié, adulé.

Alpha au sommet de sa gloire

Dès cet instant, Alpha accède à la reconnaissance internationale. Il n’est jamais trop tard pour connaitre la notoriété. L’artiste reggae enchainera d’autres albums qui seront autant de tubes. En voici une liste non exhaustive : Cocody Rock (1984), Apartheid is Nazism (1985), Jérusalem (1986), Revolution (1987), The Prophets (1989), Masada (1002), SOS guerre tribale (1993), Dieu (1994), Grand Bassam Zion Rock (1996), Yitznak Rabin (1998), Elohim (1998), Merci (2002), Jah Victory (2007), Vision (2011), Mystic Power (2013), Positive Energy (2015). A ces albums, il faut ajouter une dizaine d’enregistrements en live dont Rasta Poue en 2001 et Akwaba en 2005. Au fil de ses succès, Alpha Blondy construit davantage sa légende. Il fait les plus grandes scènes du monde, de Londres à Paris, en passant par Abidjan. Les plus grandes salles de France dont l’Olympia ou le Zénith deviennent ses aires favorites. Il sera le premier artiste ivoirien à prester devant des foules de dizaines de milliers de fanatiques en Europe et dans le monde entier. L’homme est si adulé qu’il élève la Côte d’Ivoire au rang de patrie du reggae. Aujourd’hui grâce à lui, en grande partie, la Côte d’Ivoire est la troisième place forte du reggae mondial après la Jamaïque et le Royaume Uni. De nos jours Abidjan est une plaque tournante de ce genre de musique, qui n’avait pas de succès en Côte d’Ivoire avant Alpha Blondy. Il existe même aujourd’hui un village rasta qui participe au positionnement de ce pays dans l’univers reggae. L’artiste est établi à Abidjan à plein temps depuis quelques années. Il s’est lancé dans le business sur les bords de la Lagune Ebrié. De ce fait, il a inauguré le 14 février 2015 sa radio FM à Abidjan. Elle se nomme Radio Alpha Blondy et émet sur les ondes 97.9. Bien avant cette radio, l’artiste avait ouvert un restaurant chic, le Café de Versailles qui a fermé après la crise post-électorale en Côte d’Ivoire. Après les troubles, le Café de Versailles a rouvert en 2013 suite à d’importants travaux de réhabilitation. C’est un prestigieux endroit fait de Lounge, de restaurants, de zone VIP et de salle de concert d’une capacité de mille places. La star internationale a fait une reconversion très bien réussie dans les affaires. Alpha Blondy en Côte d’Ivoire ce n’est pas que l’artiste talentueux et l’homme d’affaires. C’est aussi une personnalité qui ne mâche pas ses mots pour parler de la situation politique au pays. Ce sont sans doute là, les effets d’une éducation stricte reçue auprès de ses tantes et grandes mères. Dire toujours la vérité et être toujours franc dans ses propos, tel est son crédo.

La légende et les polémiques

Alpha Blondy, l’on le sait que trop, est un chanteur engagé comme Tiken Jah, l’autre star ivoirienne du reggae. Cette musique étant par nature militante, il ne fallait pas s’attendre à ce qu’il caresse les hommes politiques et les leaders d’opinion. Après avoir vertement critiqué les pratiques de la France en Afrique, le chanteur s’en est pris aussi aux politiciens locaux dont l’ex Président Laurent Gbagbo. Le 16 décembre 2010, alors que la contestation électorale battait son plein, Alpha Blondy est sorti de sa réserve pour demander au Président sortant de reconnaitre la voie des urnes. Vox populi, vox dei, dit-on dans le monde de la démocratie. Pourtant l’artiste soutenait Laurent Gbagbo avant la tenue des élections. Doit-on voir dans sa demande l’action d’un homme véridique malgré ses penchants politiques ? L’on ne saurait y apporter une réponse satisfaisante, à cette question. Cependant, Alpha Blondy changera de version des années après la crise pour se dédouaner de tout soutien à Laurent Gbagbo, aujourd’hui jugé à la Cour Pénale Internationale. De cette intervention pendant les heures chaudes de la crise, les partisans du prisonnier de la Haye gardent une certaine rancune envers l’artiste. Ce dernier, bien qu’il inspire encore du respect au plan musical, a perdu l’estime que ces derniers avaient pour lui. La politique est bien passée par-là, dans un pays divisé depuis des décennies entre Pro-Gbagbo et Pro-Ouattara. Pour ne pas arranger les choses, la star du reggae est traitée d’homme lunatique dans les quartiers d’Abidjan. L’on en voudrait pour preuve ses sauts d’humeur qui lui font tenir des discours contradictoires dans les médias locaux. L’on affirme qu’il est imprévisible car aujourd’hui il pourrait parler en bien de Laurent Gbagbo et d’Alassane Ouattara et demain tenir un tout autre jugement à leurs égards. Il se raconte aussi à son sujet qu’il est le parrain du chanteur Zouglou Petit Denis, qui sombre de temps à autre dans la drogue. Dans cette même perspective, une querelle avait opposé Koffi Olomidé à Alpha Blondy en 2016. A propos des accusations du chanteur congolais, Alpha Blondy affirmera : « Je n’ai rien à dire sur ce sujet. Si ce que Koffi Olomidé a avancé lui fait plaisir, tant mieux. Il y a des sujets beaucoup plus sérieux que ça. » avait conclu le reggaeman. En outre, l’un des sujets de controverse les plus anciens est celui qui l’oppose à son compatriote Tiken Jah. Les relations entre les deux méga stars du reggae mondial seraient détestables. L’on comprend aisément une telle rivalité à la lumière de la place que ces deux hommes ont dans le cœur des mélomanes. Le débat à leur sujet fait penser à celui qui opposait, il fut un temps, les fanatiques du footballeur ivoirien Didier Drogba et ceux du joueur international camerounais Samuel Eto’o.

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