Cour Africaine – Après la condamnation de Guillaume Soro à 20 ans de prison ferme, le gouvernement ivoirien, par la voie de son porte-parole, a annoncé qu’il retirait sa déclaration de compétence de la charte Africaine des droits de l’homme et des Peuples, une déclaration émise en juin 2013. Ce retrait fait suite à de graves agissements que la CADHP se serait autorisée dans le cadre de ses actions.
Frappé par un mandat d’arrêt international, Guillaume Soro a lancé sa riposte judiciaire au mois de mars en saisissant plusieurs juridictions internationales dont la Cour Africaine des droits de l’homme et des Peuples. La semaine dernière, la CADHP rendait son verdict, ordonnant à l’Etat ivoirien de suspendre les poursuites lancées contre l’ancien chef du parlement ivoirien, puis de libérer les proches de ce dernier interpellés en décembre dernier. Si le verdict n’a pas été commenté par les dignitaires du RHDP, le porte-parole du gouvernement a clairement souligné que les poursuites émises à l’encontre de l’ancien chef du parlement ivoirien étaient toujours maintenues. Une semaine plus tard, s’ouvre le procès de Guillaume Soro à Abidjan, procès à l’issue duquel il sera condamné à 20 ans de prison ferme. Le gouvernement annoncera après ce verdict son retrait de la déclaration de compétence de la CADHP, une décision à laquelle les avocats de Guillaume Soro n’ont pas tardé à répondre.
A l’issue du conseil des ministres qui s’est tenu le mercredi, le porte-parole du gouvernement ivoirien a produit une déclaration dans laquelle il annonçait le retrait de la déclaration de compétence émise par la Côte d’Ivoire auprès de la CADHP il y’a environ 6 ans : «Le gouvernement ivoirien a décidé le mardi 28 avril, de retirer sa déclaration de compétence prévue au protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des Peuples, qu’il a émise le 19 juin 2013, en application de l’article 34 alinéa 6 dudit protocole…Elle fait suite aux graves et intolérables agissements que la Cour Africaine des droits de l’homme et des Peuples s’est autorisée, dans ses actions, et qui non seulement portent atteinte à la souveraineté de l’Etat de Côte d’Ivoire, à l’autorité et au fonctionnement de la Justice, mais sont également de nature à entraîner une grave perturbation de l’ordre juridique interne des Etats et à saper les bases de l’Etat de Droit, par l’instauration d’une véritable insécurité juridique», explique Sidi Tiémoko Touré. Si aucune allusion n’est directement faite à l’affaire Guillaume Soro dans le communiqué, les avocats de ce dernier estiment que ce volte-face du gouvernement ivoirien est lié à la décision rendue le 22 avril dernier par les juges de la CADHP en Tanzanie, un verdict qui invitait le gouvernement à suspendre les poursuites contre Soro et accorder la liberté provisoire à ses proches interpellés au mois de décembre. Pour les avocats de l’ancien chef du parlement ivoirien, «Cette décision de retrait confirme, s’il en était encore besoin, que le jugement correctionnel du 28 avril 2020 rendu par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan contre M. Guillaume Kigbafori Soro, en violation de la décision de la CADHP du 22 avril 2020, s’inscrit dans une série de manœuvres politiques afin d’écarter sa candidature à l’élection présidentielle, au prix d’une grave instrumentalisation de l’institution judicaire».
Aucune incidence sur le verdict de la CADHP
«A cet égard, le Collectif des Avocats rappelle qu’il résulte de la jurisprudence constante de la CADHP qu’un État peut décider de façon souveraine d’empêcher les individus et les ONG de la saisir désormais directement afin de reconnaître la violation d’un droit de l’Homme, mais cela ne prend effet qu’à l’issue d’un délai d’un an. Ce qui veut dire que la décision du Gouvernement de M. Alassane Ouattara ne rentrera en vigueur que le 29 avril 2021. Dans cet intervalle, la saisine de la Cour directement par les individus et les ONG demeure ouverte», expliquent les conseils de Guillaume Soro.