Procès d’Amadé Ouérémi : la reprise prévue ce mercredi, le point sur les premières audiences

Tim Mars
Par Tim Mars

Démarré le 24 mars dernier, le procès d’Amadé Ouérémi se poursuit ce mercredi 14 avril, avec les plaidoiries des avocats et les réquisitions du procureur. L’ancien maître du Mont Péko (ouest de la Côte d’Ivoire) encourt la prison à perpétuité pour le massacre de plus de 300 personnes lors de la crise post-électorale de 2010-2011.

Débuté le 24 mars dernier, le procès d’Amadé Ouérémi reprend ce mercredi 14 avril au tribunal de première d’Abidjan Plateau. L’ancien chef de milice burkinabé avait été pris de malaise à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA) ce weekend. Heureusement, il a été évacué à temps dans un centre hospitalier pour y recevoir les soins appropriés. Il a été ensuite ramené dans sa cellule de prison au bâtiment C.

Amadé Ouérémi sera donc dans la salle d’audience ce mercredi pour écouter les plaidoiries de la défense et les réquisitions du procureur. Il est accusé d’avoir activement participé aux exactions qui ont fait officiellement plus de 300 morts (certaines sources parlent de 800 morts) en mars 2011 à Duékoué, ville située à l’ouest de la Côte d’Ivoire. Les victimes étaient principalement Guérés, l’ethnie locale majoritairement pro-Gbagbo. Ces Guérés ont eu maille à partir avec les allogènes Dioulas et Burkinabè pour des raisons politiques et aussi pour des problèmes fonciers.

Le récit accablant d’un témoin clé

« C’était un vrai carnage. Les corps étaient tous des vieillards. Nous avons trouvé le corps du Pasteur Doué, Pasteur de l’église du Christianisme et 25 de ses fidèles tués. Il y a également eu 36 fidèles de l’église Jésus-Sauveur tous tués. (…) C’était des tueries systématiques de personnes, principalement les hommes, sans armes ni défense », a décrit un témoin anonyme lors de l’audience du mercredi 7 avril 2021. Cet individu dit avoir vu Amadé Ouérémi le lendemain à la Sous-préfecture se vanter avec ses hommes d’avoir nettoyé le quartier Carrefour (théâtre du massacre du 31 mars 2011). « Il dit qu’il n’y avait plus de survivants. Et que, ceux qui ont eu la vie sauve sont ceux qui ont réussi à prendre la clé des champs », croit avoir entendu cet homme présenté comme un témoin clé dans cette affaire.

Un simple exécutant d’ordres ?

Toujours selon ce personnage anonyme, Amadé Ouérémi en voulait terriblement aux milices pro-Gbagbo d’avoir tué les ressortissants burkinabés lorsqu’ils régnaient sur la ville Duékoué. Il aurait donc agi par vengeance. D’autres victimes sont passées à la barre pour alourdir les accusations contre le chef milicien descendu du Mont Péko. Une femme du nom de Yvette Diao a raconté qu’elle a perdu trois frères et une sœur, exécutés par les hommes d’Amadé Ouérémi. Franck Glazai, amputé du bras droit, a déclaré que les soldats burkinabés ont tiré sur une centaine de personnes réfugiées dans une église.

Après avoir nié au début ces faits, Amadé Ouérémi a fini par se mettre à table, non sans citer des complices. Il a notamment impliqué Losseni Fofana, ancien Commandant de zone de Man, et dénoncé la responsabilité des présidents Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo. L’accusé tente ainsi de se faire passer pour un exécutant. Ce qui implique un donneur d’ordre ou du moins un chef suprême pour qui il combattait…

Un procès dans un contexte particulier

Comme les chasseurs traditionnels Dozos, Amadé Ouérémi était en effet un supplétif des Forces nouvelles (FN) à l’ouest de la Côte d’Ivoire. Ces soldats fidèles à l’actuel président ivoirien Alassane Ouattara avaient tenté un coup d’Etat contre Laurent Gbagbo en 2002. Le putsch ayant échoué, ils s’étaient repliés au nord et à l’ouest du pays. En 2010, après que Laurent Gbagbo a refusé de reconnaitre sa défaite (selon la communauté internationale), les FN avaient lancé une offensive sur le sud du pays, avec l’appui de la France et de l’ONU. Finalement Laurent Gbagbo sera arrêté dans son bunker, après plusieurs semaines de combats à Abidjan.

Notons que l’ancien président Ivoirien a été récemment acquitté par la Cour pénale internationale (CPI) des accusations de crimes de guerre et crimes contre l’humanité pour insuffisance de preuves. Il doit bientôt rentrer au pays, après qu’Alassane Ouattara a donné son feu vert. L’actuel chef d’Etat ivoirien a promis que les frais de transport de Laurent Gbagbo ainsi que ceux de sa famille seront pris en charge par l’État ivoirien. Une annonce saluée par l’ensemble des Ivoiriens qui rêvent à présent d’une véritable réconciliation nationale.

Partagez cet article