Né dans le milieu des années 1990 avec le professeur Djeni Kobinan, dissident du PDCI-RDA d’Houphouët Boigny, le RDR est vite devenu une force politique majeure sous la présidence de l’économiste du FMI, Alassane Dramane Ouattara.
Aujourd’hui l’ancien directeur adjoint du Fonds Monétaire International est à la tête de l’Etat de Côte d’ivoire après plusieurs années de déboires significatifs. C’est dire que sa personne même a longtemps posé problème au sein de la classe politique ivoirienne. Ecarté pour ses origines présumées burkinabés, à la fois sous Henri Konan Bédié et sous Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara ne cessera d’incarner le sort de tous les étrangers et les binationaux du pays. C’est presque sur ce socle pseudo xénophobe que prospèrera le Rassemblement Démocratique des républicains, en lequel une frange assez importante de la population ivoirienne se reconnaitra. A l’occasion de la rébellion de 2002, le RDR passera aux yeux des partisans de Laurent Gbagbo comme l’ennemi de la Côte d’Ivoire malgré les tentatives de dédouanement de ses leaders. Aujourd’hui au pouvoir, le RDR essaie de réparer les torts qu’il aurait subis dans le passé. Son pouvoir, il le partage en partie avec le PDCI-RDA, son grand allié au sein du Rassemblement des Houphouetistes pour la Démocratie et la Paix.
Sommaire :
Création du RDR avec Djeni Kobinan
La présidence d’Alassane Ouattara après la mort du père-fondateur
Le RDR et la question de la rébellion
Le RDR et l’élection présidentielle de 2010
L’alliance du RHDP et l’alternance de 2020
Quelques personnalités du RDR
Création du RDR avec Djeni Kobinan
Le Rassemblement Démocratique des Républicains (RDR) est une dissidence du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). C’est pourquoi, certains cadors du vieux parti réclament maintenant que le RDR soit englouti au sein du PDCI à la faveur du parti unifié. Le RDR a été créé dans les années 1990 par Djeni Kobinan, un ancien dignitaire du PDCI-RDA. Georges Djeni Kobinan Kouassi est né le 8 août 1937 à Gagnoa où son père d’origine N’zima travaillait. Ce professeur certifié de formation s’engagera dans le syndicalisme au début des années 1970. De juillet 1970 au 31 mars 1971, Djeni Kobinan fut le 1er secrétaire général du Syndicat des Enseignants du Secondaire de Côte d’Ivoire. Après avoir combattu un temps contre le PDCI-RDA, il rentre vite dans les rangs en devenant, quelques années plus tard, secrétaire national du PDCI chargé des relations avec les partis politiques. Il demeurera pendant longtemps un ponte du parti unique jusqu’à une convention du PDCI-RDA en 1994. Lors de ce congrès extraordinaire, la parole lui est refusée pour son adversité notoire envers le président Henri Konan Bédié. Frustré, il crée son le Rassemblement Démocratique des Républicains, un parti libéral qu’il situe au centre-gauche de l’échiquier politique national ivoirien. Fort de son statut de père fondateur, il est élu secrétaire général du RDR en juillet 1995 et participera au Front Républicain aux côtés du Front Populaire Ivoirien de Laurent Gbagbo. Le 19 octobre 1998, il meurt dans des circonstances non encore élucidées, dans un hôpital aux Etats Unis.
La présidence d’Alassane Ouattara après la mort du père-fondateur
Bien que le RDR soit aujourd’hui exclusivement associé à la figure d’Alassane Dramane Ouattara, le parti est une création de Djeni Kobinan qui avait déjà impulsé une dissidence du PDCI-RDA au début des années 90 avec le PDCI-Rénovation. Né du regroupement des proches de Djeni Kobinan et ceux d’Alassane Ouattara, tous opposants à Henri Konan Bédié, héritier constitutionnel de feu Felix Houphouët Boigny, le RDR gagnera très facilement la sympathie d’une certaine partie de la population dès la présidence du Docteur Alassane Dramane Ouattara. Dans la configuration ethnique de la Côte d’Ivoire, la présence d’Alassane Ouattara à la tête du RDR représentait enfin une redistribution plus juste de la politique nationale. C’est ainsi que beaucoup d’Ivoiriens du Nord, autrefois dispersés au sein du PDCI et du FPI, ont rejoint les rangs du RDR, un parti enfin à leur image. Dès lors, le président Alassane Ouattara détenait les aspirations les plus légitimes de toute une population qui avait l’impression d’être la bête de somme des autres groupes ethniques. Avec l’aura de l’ancien directeur adjoint du FMI, le RDR gravit les échelons et devient l’un des partis les plus importants de Côte d’Ivoire. La politique d’Ivoirité d’Henri Konan Bédié, en 1998, renforcera davantage le sentiment, chez les nordistes, d’être des parias de la République. Sous la présidence Bédié, le RDR devient presqu’un parti non grata dans la sphère politique ivoirienne. Son président Alassane Ouattara est poursuivi pour fraude sur la nationalité et est obligé de s’exiler. Lorsque s’opère le putsch de 1999, il revient au pays, mais rien ne changera à l’opinion qu’on a de ses origines. Il est normalement écarté de la présidentielle de 2000 que remporte Laurent Gbagbo face au général putschiste Gue Robert. Dans la foulée, Laurent Gbagbo est accusé d’avoir orchestré le charnier de Yopougon dans lequel 60 membres présumés du RDR auraient été enterrés après avoir été exécutés.
Le RDR et la question de la rébellion
Lorsque survient la crise militaro-politique de 2002, le RDR est pointé du doigt par le régime de Laurent Gbagbo. Ce dernier et ses partisans accusent le RDR d’avoir planifié la rébellion depuis le Burkina Faso avec la bénédiction de Blaise Compaoré. Bien que certaines personnalités, comme Soro Guillaume, aient concédé la paternité de la rébellion, le RDR est toujours perçu comme le vrai auteur. Quoiqu’il en soit, les Forces Nouvelles (nom accordé à la rébellion après les accords de paix) ont constamment manifesté une certaine sympathie envers le mentor du RDR, Alassane Dramane Ouattara. Cette sympathie se consolidera par un soutien majeur pendant la crise post-électorale.
Le RDR et l’élection présidentielle de 2010
Les forces nouvelles ont précipité le départ de Laurent Gbagbo comme ce dernier refusait de quitter le pouvoir après sa défaite proclamée par la CEI et la communauté internationale. Les hommes de Guillaume Soro, appuyés par les forces françaises et onusiennes sont venus à bout du régime FPI, après d’âpres combats dans la capitale ivoirienne. Les affrontements entre forces nouvelles et loyalistes de Laurent Gbagbo (FDS, miliciens et mercenaires Libériens) auraient fait, officiellement, plus de 3000 morts. D’ailleurs, après sa prise de pouvoir, le président du RDR est obligé de composer avec cette force armée qui a grandement participé à son installation. Fort de cela, certains de ses cadres comme le président de l’Assemblée Nationale, ont pris une place prépondérante au sein du parti au pouvoir. Même s’il apparait souvent comme un électron libre de la politique ivoirienne, l’ex secrétaire général de forces Nouvelles, Guillaumes Soro, dit se réclamer du RDR.
L’alliance du RHDP et l’alternance de 2020
Au pouvoir depuis avril 2011, le RDR ambitionne d’y rester en 2020, si l’on s’en tient aux propos de certains de ces responsables. Cependant, l’équation posée par l’accord de Daoukro pourrait remettre en cause ce projet. Personne ne peut contester que si le RDR gouverne aujourd’hui la Côte d’Ivoire c’est non seulement grâce à l’appui armé des Forces Nouvelles, mais aussi grâce au soutien politique du PDCI-RDA d’Henri Konan Bédié. Ce dernier, ayant appelé à voter pour le RDR en 2010 et ayant concédé le pouvoir en 2015, attend maintenant qu’on lui renvoie l’ascenseur. Au nom de l’alternance signée à Daoukro en 2015, les responsables du plus vieux parti de Côte d’Ivoire, sont de plus en plus pressants envers le pouvoir en place. Le RDR dont le président a décidé, un peu tacitement, de ne pas se représenter en 2020, n’est cependant pas dépourvu de leaders pour succéder à Ouattara.
Quelques personnalités du RDR
Au-delà de la figure très imposante du Président Alassane Dramane Ouattara, le RDR a de beaux restes. Certes beaucoup d’observateurs se demandent ce qui adviendra du RDR si Alassane Ouattara se retirait de la vie politique, mais une nouvelle génération de leaders qui attend dans l’antichambre devrait rassurer. Toutefois, l’empressement des uns et les ambitions des autres risquent de faire un peu trop désordre. A l’heure actuelle, nous pouvons classer ces leaders du RDR en trois catégories. Dans la première nous rangeons Soro Guillaume, l’actuel président de l’Assemblée Nationale, Hamed Bakayoko l’actuel ministre de l’Intérieur et Amadou Gon Coulibaly, l’actuel premier ministre. Le premier se prévaut d’un rôle joué dans la crise post-électorale et les deux autres de leur fidélité sans failles au Chef de l’Etat. Dans la 2e catégorie nous avons des personnalités honorifiques comme Henri Dagri Diabaté, président d’honneur du parti, Kandia Camara ministre de l’éducation nationale ou encore Cissé Bacongo, conseiller spécial du président de la République. Dans la dernière catégorie, celle de la relève nous classons des jeunes leaders comme Karamoko Yayoro, Dah Sansan et Touré Mamadou. Etrangement, l’après Ouattara, très indécis, nous donne un air de déjà vu, un air d’héritage du vieil Houphouët Boigny. Malgré ces inquiétudes, le Chef de l’Etat n’a toujours pas éclairé l’opinion nationale et internationale sur ses préférences parmi ces nombreux successeurs. Pourvu seulement que le scénario de 1993 ne se répète pas car la Côte d’Ivoire n’en a plus besoin. A moins de deux ans de la présentielle voilà peut-être ce qui devrait le plus préoccupé le pouvoir en place.