Après la colonisation, l’Afrique a vu émerger une nouvelle classe de dirigeants politiques qui ont chacun, à leur manière marquer l’histoire. Si l’accès à l’indépendance de la majorité des états africains remonte aux années 1960, nombre de pays africains ont connu des présidents avant cette période. Zoom sur le top 10 des dirigeants africains venus après la période coloniale.
Difficile de dire si les dix premiers présidents africains étaient les plus riches, mais ils ont à jamais marqué l’histoire du continent africain pour leur combat en faveur de l’indépendance africaine. Felix-Houphouët Boigny, le tout premier chef d’Etat de la Côte d’Ivoire, ne sera malheureusement pas présent dans ce classement des 10 premiers présidents africains après la colonisation. En revanche, l’un de ses compagnons de lutte africain, le ghanéen Kwame Nkrumah sera lui citer sur ce podium, en raison du fait que son arrivée au pouvoir remonte à quelques mois avant celle de l’ancien chef d’Etat ivoirien. Rappelons qu’aucun des chefs d’Etats africains assassinés au pouvoir ne figure dans ce top 10 des premiers dirigeants africains venus après l’indépendance. Sans surprise, le Libéria aujourd’hui dirigé par l’ancien ballon d’or George Weah, est en tête du classement, étant donné qu’il est le premier pays africain à avoir accédé à l’indépendance. Difficile de savoir si ces présidents étaient les mieux payés d’Afrique mais certains étaient manifestement riches, étant donné qu’ils ont passé des dizaines d’années au pouvoir.
10e Ahmadou Ahidjo (Cameroun)
Sur le plan historique, le Cameroun est le dixième pays africain à avoir pris son indépendance. L’indépendance camerounaise a été officiellement proclamée en 1960, une année au cours de laquelle de nombreux états d’Afrique noire ont arraché leur autonomie aux colons, la Côte d’Ivoire, le Mali, le Niger, le Bénin, le Togo ou encore le Gabon, pour ne citer que ces états. Mais chronologiquement, le Cameroun reste le premier pays parmi les états déclarés indépendants durant la période 1960, puisque l’indépendance camerounaise a été officiellement proclamée le 1er janvier 1960. Et son premier président se nommait Ahmadou Babatoura Ahidjo. Né le 24 août 1924 puis décédé le 30 novembre 1989 dans la ville de Dakar, Ahmadou Babatoura a été président du Cameroun du 5 mai 1960 au 4 novembre 1982. De confession musulmane, le premier président camerounais a d’abord travaillé pour l’administration coloniale française en tant qu’opérateur radio et télégraphiste, en dépit de son statut d’autodidacte. Ahmadou Babatoura Ahidjo fut élu sous la bannière de l’Union Camerounaise (UC) dont il fut le fondateur, la formation politique connue aujourd’hui sous l’appellation de RDPC et sous laquelle Paul Biya dirige depuis des décennies le Cameroun. L’avènement au pouvoir du premier président camerounais aurait été rendu possible grâce à l’aide des forces françaises d’après certains historiens. Pour asseoir son autorité au Cameroun, Ahmadou Babatoura Ahidjo a sollicité l’aide de la France pour mettre fin à plusieurs rebellions dans le pays. Le 4 novembre 1982, le premier chef d’Etat camerounais cède le fauteuil pour des raisons de santé à Paul Biya qui était alors son premier ministre. Depuis la prise de son indépendance à aujourd’hui, le Cameroun n’a connu que deux chefs d’Etats.
9e Sékou Touré (Guinée)
Ahmed Sékou Touré fut le tout premier président de la République de Guinée et aussi la neuvième personnalité africaine à avoir occupé un fauteuil présidentiel après l’indépendance de son pays. Né le 9 janvier 1922 dans la ville de Faranah, il a occupé les fonctions présidentielles en Guinée pendant 25 et 5 mois plus précisément, c’est-à-dire du 2 octobre 1958 au 26 mars 1984, date à laquelle il rendit l’âme dans la ville de Cleveland aux Etats-Unis. Originaire de l’ethnie mandingue, Sékou Touré est l’un des petits fils de l’imam Samory Touré à travers à sa mère qui était l’une des filles de cet opposant à la colonisation occidentale. Avant d’être président la Guinée, Sékou Touré a d’abord travaillé en tant que responsable des postes. Plus tard, il prend les rênes du syndicat des employés de la poste en Guinée. Le premier président guinéen fut à l’origine de la formation du tout premier parti politique du pays, à savoir le Parti Démocratique Guinéen qui a vu le jour en 1947. En 1956, Sékou Touré est élu député à l’Assemblée Nationale française pour le compte de la Guinée. La même année, il devient également le maire de Conakry, la capitale guinéenne. Parmi 18 états ayant pris part à un référendum organisé par la France en septembre 1958, la Guinée est le seul pays optera pour le « non » à une union avec la France en grande majorité, préférant prendre intégralement son indépendance. Le 2 octobre de la même année, Sékou Touré devient donc le premier président de la République de Guinée.
8e Kwame Nkrumah (Ghana)
Kwame Nkrumah est une figure de la résistance africaine. Né le 21 septembre 1909 dans la localité de Nkroful, il fut l’un des pères fondateurs du RDA, le Rassemblement Démocratique Africain. Ce panafricaniste engagé qui est aujourd’hui un exemple pour de nombreux présidents est décédé en 1972 en Roumanie. Issu d’une famille modeste, Kwame Nkrumah a d’abord travaillé en tant que moniteur avant de poursuivre son cycle universitaire aux Etats-Unis en 1935. Quatre années plus tard, à savoir en 1939, il revient des Etats-Unis avec deux diplômes en poche, une licence en sociologie et en économie. En 1947, il prend les rênes de l’UGCC, une formation politique au sein de laquelle il impulsera de nouvelles dynamiques. Dans sa politique de propagande, Kwame Nkrumah multiplie les conférences à travers son pays pour répandre son idéologie. Mais une manifestation organisée en 1948 tournera mal puisqu’elle coutera la vie à plus de 20 personnes. Les responsables de l’UGCC décident donc de le démettre de son poste de secrétaire général du parti indépendant qu’il occupait depuis 1947. Mais toujours adulé par la jeunesse de son ancien parti, Kwame Nkrumah décidé de créer un nouveau parti, le CPP, un parti aux idéologies purement socialistes. Pour avoir appelé à la désobéissance civile, l’un des pères de la résistance africaine sera emprisonné en 1950. En 1956, le CPP domine largement les législatives au Ghana et remporte un peu plus de trois quarts des sièges. L’année suivante Kwame Nkrumah pousse la Grande-Bretagne à reconnaitre l’indépendance du Ghana qui sera officiellement proclamée le 6 mars 1957. Le 1er juillet 1960, Kwame Nkrumah est élu premier président de la République du Ghana.
7e Mohammed V (Maroc)
Connu à l’Etat civil sous le nom de Sidi Mohammed ben Youssef, Mohammed V fut le tout premier président du Royaume chérifien après la déclaration d’indépendance du Maroc. Né le 10 août 1909 dans la ville de Fès, il est l’un des quatre enfants du Sultan Moulay Youssef qui dirigeait le Maroc avant que le Royaume n’arrache son indépendance. Suite à la mort de son père, Mohammed V est choisi par la France en lieu et place de ses frères aînés pour diriger le Royaume. Avec la montée du Nationalisme en 1957, Sidi Mohammed ben Youssef est contraint à faire les premiers pas vers l’exigence de l’indépendance de son pays à la France. A l’occasion d’un discours historique tenu dans la ville de Tanger, le roi Mohamed V fait part son intention de faire adhérer le Maroc à l’organisation « Ligue Arabe ». Le Maroc étant résolument engagé dans la voie vers l’indépendance, les relations entre Mohamed V alors sultan du Royaume chérifien et les autorités françaises connaitront plus tard de nombreuses tensions. Il est démis par les autorités françaises qui l’avaient désigné comme sultan du Maroc, mais refusera de se soumettre à cette décision. Mohamed V sera donc mis aux arrêts puis déporté plus tard vers le Madagascar. Au lieu d’apaiser la situation, son arrestation suscitera une vague de violences sans précédents menée par des nationalistes marocains. Face aux pressions nationalistes, la France se résout à rappeler le sultan déporté vers le Madagascar. En novembre 1955, Sidi Mohammed et la France se mettent d’accord sur les modalités de déclaration d’indépendance du Royaume. Le 7 avril 1956, l’indépendance du Maroc sera officiellement proclamée et le 14 août de la même année Mohamed V sera élu comme le premier président du Royaume chérifien indépendant.
6e Habib Bourguiba (Tunisie)
Né à en croire certaines sources en 1903, Habib Bourguiba fut le premier président de la Tunisie après la proclamation d’indépendance de son pays. Après avoir suivi une formation d’avocat en France, l’homme d’Etat tunisien retourne dans son pays auprès des siens pour en luttant pour la cause du nationalisme. Fort de son contact avec les milieux nationalistes de son pays, Habib Bourguiba créé en 1934 un parti politique dénommé Néo-Destour, une formation politique qui jouera un rôle majeur dans la lutte pour l’indépendance de la Tunisie. Si le pays a officiellement obtenu son indépendance en 1956, la Tunisie fonctionnait toujours sous le régime de la monarchie. Habib Bourguiba est donc le dirigeant à qui l’on doit la Tunisie actuelle qui fonctionne sur le Régime de la République. Un an après la proclamation d’indépendance de son pays, Habib Bourguiba est élu par l’Assemblée Constituante tunisienne comme étant le premier président de la République Tunisienne le 25 juillet 1957. Le père de l’indépendance tunisienne sera réélu à plusieurs reprises mais désormais au suffrage universel, d’abord une première fois en novembre 1959, ensuite en novembre 1964 jusqu’au 18 mars 1975 où il sera élu président à vie de la République. Mais le dirigeant tunisien sera contraint de renoncer à son mandat à vie à la tête du pays, notamment pour des raisons de santé. En novembre 1987, des médecins certifient l’incapacité d’Habib Bourguiba à conduire les destinées de son pays. Il passe donc le flambeau à Zine el-Abidine Ben Ali qui était à cette époque son premier ministre, conformément à la Nouvelle Constitution de son pays.
5e Ismail al-Azhari (Soudan)
Né le 20 octobre 1960, Ismail al-Azhari fut le premier président de la République du Soudan après son indépendance acquise le 20 mars 1956. Après des études de Mathématiques aux Etats-Unis, Ismail al-Azhari enseigne les Maths et travaille également pour l’administration coloniale. Avec l’appui de plusieurs camardes également intellectuels, il milite en faveur d’une plus grande participation des soudanais dans la vie administrative mise en place dans l’administration coloniale. C’est ainsi que lui et ses compagnons de lutte formèrent en 1942 un congrès qui au départ n’avait aucune ambition politique. Mais les revendications formulées par ce congrès dirigé par les intellectuels seront purement rejetées par l’administration coloniale britannique. Conséquence de ce rejet, le Congrès sera scindé en deux groupes. Connu pour son fort engagement dans le nationalisme, Ismail al-Azhari était lui du côté des intellectuels qui souhaitaient une rupture radicale avec l’administration britannique qui était en place. L’année suivante, Ismail al-Azhari et ses compagnons de lutte fidèle à son idéologie de rupture totale fondèrent le parti politique baptisé « Ashiqqa », une formation politique fortement soutenue par les musulmans. Avant d’occuper les fonctions présidentielles au Soudan, Ismail al-Azhari a d’abord été Premier Ministre du Soudan pendant deux ans, du 6 janvier 1954 au 5 juillet 1956. C’est le 10 juin 1956 qu’il sera élu président de la République du Soudane, c’est-à-dire environ trois mois après la déclaration d’indépendance du pays. Cependant, Ismail al-Azhari ne restera en poste que durant quatre ans, puisqu’il sera renversé en 1969 par un coup d’Etat militaire orchestré par le colonel Gaafar Nimeiry.
4e Idris Ier (Lybie)
Malgré la proclamation de l’indépendance de la Libye le 24 décembre 1951, le pays n’a pas pour autant mis fin au régime de la monarchie. Pour cause, son premier dirigeant après l’acquisition de son indépendance, Mohammed Idris El-Mahdi El-Senussi connu sous le nom d’Idris Ier, avait officiellement le statut de Roi de Lybie plutôt que celui de Président de la République. Né le 12 mars 1889, il avait connu l’exil vers l’Egypte en 1923 avant d’être intronisé quelques années plus tard Roi de Lybie. L’intronisation du roi Idris Ier à la tête de la Lybie a eu lieu le 24 décembre 1951, la journée durant laquelle l’indépendance de la Lybie a été officiellement proclamée. Alors qu’il était en rendu en Turquie pour suivre un traitement, Idris Ier voit son royaume s’écrouler après 17 ans et 8 mois de règne, à la suite d’un coup d’Etat perpétré par un jeune capitaine de l’armée, le guide Mouammar Kadhafi. Grâce à un coup d’Etat militaire, Mouammar Kadhafi met un terme au règne de Mohammed Idris El-Mahdi El-Senussi qui refusera de regagner son pays après le coup d’Etat, et ce malgré le statut de citoyen d’honneur que lui offrait le nouveau pouvoir en place. Idris Ier sollicite l’aide de la Grande-Bretagne pour tenter de reprendre le contrôle mais sans succès. En 1972, le régime de Mouammar Kadhafi le jugera par contumace en le condamnant à la mort. En exil au Caire, le premier dirigeant de la Libye après son indépendance décède en mai 1983. Si l’arrivée de Mouammar Kadhafi a mis fin au régime de la monarchie, la Lybie n’a connu aucune transition démocratique sous l’ère du colonel, jusqu’à ce que le vent de révolution arabe mette fin à son règne en 2011.
3e Fouad Ier (Egypte)
A l’image du premier dirigeant de la Lybie après son accès à l’indépendance, celui de l’Egypte avait également le statut de roi. Né le 26 mars 1868, Fouad Ier est le tout premier dirigeant que le Royaume d’Egypte a connu après avoir obtenu du Royaume Uni, l’ancienne puissance coloniale, son indépendance le 28 février 1922. Il convient de rappeler que le règne de Fouad Ier en Egypte avait officiellement démarré en 1917. Mais ce n’est qu’en 1922, lorsque l’indépendance égyptienne sera prononcée et que l’Egypte sera constituée en Royaume, qu’il prendra officiellement le titre de Roi d’Egypte dans son pays. Fouad Ier décède en avril 1936 après un peu plus de 18 années de règne à la tête de son pays. Son fils Farouk né de son deuxième mariage accèdera au trône après sa mort pour un règne qui durera 16 ans. Mais Farouk est renversé par son fils Fouad II par un coup d’Etat orchestré en juillet 1952. Après une année de règne, Fouad II sera à son tour évincé du pouvoir avant d’aller vivre en Suisse. Son éviction signera également le passage de l’Egypte vers un nouveau régime, mettant fin à la monarchie instaurée par le tout premier dirigeant égyptien de la période d’après indépendance.
2e Charles Swart (Afrique du Sud)
Malgré la proclamation d’indépendance en 1910, l’Afrique du Sud a attendu jusqu’au 31 mai 1961 avant de connaître son premier président de la République. Né le 5 décembre 1894, Charles Swart est le tout premier sud-africain à présider aux destinées de son pays. Car en dépit de la proclamation d’indépendance du pays, l’Afrique du Sud avait été dirigée par de nombreux gouverneurs étrangers provenant majoritairement du Royaume-Uni, l’ancienne puissance coloniale. Avocat de profession, il fera ses premiers pas en politique en tant que membre du parlement sud-africain à partir de 1923. Après la victoire de son parti aux élections générales de 1948 en Afrique du Sud, Charles Swart gravit les échelons en occupant plusieurs fauteuils ministériels. Il est d’abord nommé ministre de l’éducation nationale de 1949 à 1950, avant de se voir confier des responsabilités encore plus importantes dans les années à venir. Mais un an avant sa nomination au département de l’éducation nationale, Charles Swart avait été nommé ministre de la justice dans son pays, un fauteuil qu’il occupera jusqu’en 1959. Aussi, en 1955, l’avocat se fera confier un nouveau poste ministériel, celui de Vice-premier ministre jusqu’en 1959. Très attaché au nationalisme, le premier président d’Afrique du Sud refuse de prêter allégeance à la Reine Elisabeth II du Royaume-Uni, signe de la rupture totale avec l’ancienne puissance coloniale. Dans une Afrique du Sud où seuls les blancs avaient d’abord le droit de vote, un référendum a lieu en octobre 1960, à l’issue duquel les sud-africains décident de mettre un terme à tout lien avec l’ancienne puissance coloniale. L’année suivante, Charles Swart est élu premier président d’Afrique du Sud.
1er Joseph Jenkins Roberts (Libéria)
Historiquement, le Libéria est le premier état africain dont l’indépendance a été proclamée. Si l’on se base sur l’histoire, le Libéria a accédé à son indépendance officiellement le 16 juillet 1847. Un an après la proclamation de son indépendance, le pays connaissait son premier président de la République. Né le 15 mars 1809 dans la ville de Norfolk, Joseph Jenkins Roberts fut la toute première personnalité à occuper les fonctions présidentielles au Libéria, l’ancienne colonie américaine. Emigré au Libéria à l’âge de 20 ans, Joseph Jenkins Roberts a d’abord démarré en tant que commerçant avant de se lancer dans une carrière politique. C’est à l’âge de 39 ans, à savoir le 3 janvier 1948, qu’il sera élu comme le tout premier chef d’Etat libérien. Après un règne qui a duré 8 ans, Joseph Jenkins Roberts a passé le flambeau à Stephen Allen Benson. Rappelons que le Libéria reste le pays africain qui a connu le plus de dirigeants après les indépendances.